David Numwami : quand un génie de la pop se pose au Paradis !
Quand il ne défraie pas la chronique sur les Inrocks, Vice ou la RTBF, David Numwami se pose à l’Eden, avec sa fine équipe, pour une petite semaine de résidence et surtout de beaux accidents musicaux.
On part à la rencontre de David Numwami et Clément Marion dans la Grande salle. Même si les gradins vides du public auraient tôt fait de nous déprimer, on remarque surtout le dispositif sur scène : de nombreux instruments, beaucoup de micros et deux tabourets mis en vis-à-vis. Si on n’était pas en période de confinement, on aurait l’impression qu’un concert débuterait dans quelques instants…
Tandis que les musiciens bruxellois finissent d’enregistrer un de leurs nouveaux morceaux (on vous le partage en exclusivité, en fin de cet article), Nathalie De Lattre, notre programmatrice glisse « Tu sais, David, je le connais depuis longtemps. Je l’ai découvert dans le concours Du F. dans le texte. T’imagines ? » Encore une fois, il n’y a pas de hasard.
L’ambiance est détendue. David et Clément sont souriants. On s’installe confortablement. Le deux se connaissent depuis longtemps. Plus de 7 ans. Et ça a été le coup de foudre. Amical et musical. L’un joue de la musique dans le groupe de l’autre, puis on inverse les rôles. Facile quand on est colocataires, en plus !
Alors quand David a décidé de s’évader un peu de leur groupe Le Colisée, il n’y a pas eu l’ombre d’un doute que ce serait Clément qui l’accompagnerait dans son voyage.
David Numwami est diplômé en musicologie et philosophie. Il a partagé la scène avec des artistes de renom comme Charlotte Gainsbourg ou Sébastien Tellier. Et même s’il n’a, à son actif, que 2 clips, on ne peut que tomber sous le charme de ses créations colorées et décalées. Son projet solo, il le décrit comme un journal intime qu’il tient secrètement depuis des années. Il a commencé à écrire pendant les tournées, le soir après les concerts.
Pourtant, il nous avoue qu’il rêvait d’une résidence telle que celle-ci depuis trop longtemps. Même s’il s’est engouffré dans la brèche de la reprise de cet été, avec quelques concerts (dont une version illustrée en live avec Camille Potte), cette façon de créer n’est pas dans ses habitudes. La plupart du temps, il fait tout depuis son salon !
Happy-pop mélancolique ?
Clairement, son univers est décalé. L’erreur serait de croire qu’il est léger mais absolument pas. Il caractérise sa musique comme une « happy-pop mélancolique ». Et c’est là tout le paradoxe créatif de David Numwami : aller extirper la petite once de joie qu’on peut retrouver dans une situation alors que celle-ci n’aurait rien de bien heureux. D’ailleurs, sa résidence à l’Eden lui a permis de révéler le potentiel mélancolique de ses morceaux.
« Par exemple, Beats !, je trouve que ce sont des paroles assez déprimantes. Je raconte qu’il n’y a plus trop d’espoir de faire des concerts, que c’est dur financièrement. Mais au moins, je peux être chez moi et faire de la musique. Alors en plus, s’il y a moyen de danser dessus, c’est cool aussi. »
D’ailleurs, ce morceau, il l’a écrit il y a quelques mois à peine, durant le premier confinement. Un titre qui s’adressait à la fois à lui-même et à tout-un-chacun. « J’essayais de traduire ce que d’autres personnes ressentent et pas seulement des artistes. On a des émotions qui se recoupent. »
Cette deuxième période de cloisonnement, il l’a d’ailleurs envisagée différemment. En témoigne cette résidence. Pour David et Clément, il était clair que l’Eden serait un laboratoire pour expérimenter de nouvelles choses : des nouveaux arrangements, des nouveaux instruments, disséquer ses propres morceaux et les étudier … Hors de question de refaire ce qu’ils savent déjà faire.
Ici, les deux musiciens ont troqué les blouses blanches contre des claviers et des vocodeurs : « On a déjà une dizaine de morceaux sur lesquels on s’éclate en concert. Ici, on voulait expérimenter quelque chose de beaucoup plus calme. On a joué les mêmes dix titres en boucle pendant trois jours. À chaque fois, une version différente pour voir à quel moment quelque chose se passe. »
Je ne fais pas de playback !
C’est une occasion que David attendait depuis longtemps. Disposer d’une salle et d’une installation pour pouvoir enregistrer et imaginer ses prochains concerts.
« Pendant un live, si tu fais exactement la même chose que sur ton album, c’est pas très intéressant. Autant faire directement tourner le CD. Or, je ne fais pas de playback ! J’ai envie d’essayer plein nouvelles versions. De provoquer plein de joyeux accidents. » On rêve déjà de son prochain concert en nos murs.
D’ailleurs, ce serait la troisième fois qu’il viendrait à l’Eden. Un des seuls lieux qu’il connait à Charleroi, avec le Vecteur qui l’accueille pendant la semaine. Même si on le soupçonne de rêver secrètement avoir grandi ici, il nous avoue ne pas bien connaitre la ville, si ce n’est ce qu’on lui en a décrit. Et son séjour à Charleroi, dans cette période si particulière, lui laisse envisager le meilleur à venir. La ville, en hibernation forcée, laisse peu l’occasion d’aller à la rencontre de sa population, de trainer sur les terrasses, de découvrir et s’étonner. Il sait pourtant que les carolos ont un rapport puissant et intense à la métropole. Ce qu’on ne retrouve pas ailleurs. Les carolos ont envie de parler de leur ville, de la représenter !
On espère le retrouver sur la Boucle Noire et au Panorama dont il a beaucoup entendu parler !
On confirme ! Une des forces des carolos, c’est d’aller là où on ne les attend pas. Et la Boucle Noire est un exemple parmi tant d’autres… Cette aventure à travers les terrils et les paysages post-industriels, au croisement de Mad Max et Blade Runner, sont, pour beaucoup d’artistes, une incroyable source d’inspiration à la fois minérale et organique !
Tout au long de cette rencontre, David fait à la fois preuve d’humilité et de précision. À l’image de ce qu’il considère tant comme une force, qu’une faiblesse : ne pas se prendre la tête.
Pourtant, ça n’a pas toujours été comme ça. Notamment quand il a commencé la musique, à l’âge de 5 ans. Il nous raconte que c’est sa mère qui l’a obligé à suivre des cours. Et ce n’est qu’à ses 10 ans, qu’il a commencé à prendre du plaisir à jouer. Depuis, la musique ne l’a plus quitté et il ne pense plus qu’à ça…
Un dernier mot pour la fin David ? « Bisou M’chou » évidemment !
Photos © Olivier Bourgi
Allez faire un tour sur son profil Instagram !
Il perpétue une tradition initiée avec Le Colisée : faire des montages débiles. Avec un ton décalé et des images colorées, il s’amuse à essayer des choses et à les rater, sans se prendre au sérieux.
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