La Walbanie, j’en suis baba

Le sens de la fête

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Mercredi 24 janvier, dès 19 heures, Karel Vanhaesebrouck, spécialiste du spectacle vivant, questionnera la dimension subversive du Carnaval et décryptera cet événement sous l’angle « anthropo-sociologique ». Teasing !

Le Carnaval aujourd’hui, guindaille ou critique sociétale?

Karel Vanhaesebrouck : « Il faut faire une distinction entre “carnaval” et “carnavalesque”. Le carnavalesque, c’est ce mécanisme de détournement durant lequel on se moque du sérieux, on amène l’imagination au-delà du quotidien. Avec humour, on cherche à montrer que ce que l’on considère normal ne l’est peut-être pas. C’est une zone d’expérimentation et de transgression dans laquelle tous les rapports sociaux et de pouvoir sont inversés. Le bouffon peut se revendiquer de l’espace public pour enfin dire “la” vérité… Grâce à ce mode d’inversion, une communauté peut dépasser ses propres frontières et, en se mettant en spectacle elle-même, imaginer sa propre identité. De l’autre côté, il y a le Carnaval en tant qu’événement festif et pas forcément carnavalesque ».

Le Carnaval aujourd’hui, événement marketing ou outil de cohésion sociale?

K.V. : « Les spectacles de rue qui attirent un large public peuvent avoir un impact sur l’image de la ville qui les abrite. Prenons l’exemple de la Zinneke Parade, qui se retrouve divisée entre une célébration subversive de l’altérité et le city marketing de la capitale. Bruxelles aime exploiter l’image de cet événement pour revendiquer son côté multiculturel. Autre exemple : les parades gay qui sont sponsorisées par les marques et récupérées par les municipalités pour se donner une image de tolérance, d’ouverture et de créativité, alors que la réalité sur le terrain s’avère souvent être le contraire. Le gaywashing parfait ! Le Carnaval n’échappe pas à cette tendance. Mais qu’il soit récupéré par notre système économique ne signifie pas qu’il n’a pas un impact positif sur les populations concernées. Faire participer l’ensemble d’une communauté, avec tout ce qu’elle a d’hétérogène, dans un événement collectif, voilà un vrai enjeu ! Tomorrowland est peut-être le contre-exemple, par excellence, de ce désir : cet event mainstream vend l’illusion d’une bulle collective alors qu’il rassemble des individus isolés les uns des autres, vivant l’événement à travers l’écran de leur smartphone qui les connecte à leurs amis… virtuels ».

Le Carnaval aujourd’hui, patrimoine à pérenniser ou folklore à inventer ?

K.V. : « Côté pile, le Carnaval, c’est la fête de l’altérité. Côté face, il est synonyme de repli sur soi, dans sa volonté de préserver et transmettre un héritage culturel. Le but est de protéger un patrimoine, mais le patrimoine de qui ? Nos villes sont multiculturelles et pour une grande partie de la population, le patrimoine se trouve ailleurs. C’est pour cela que la Zinneke Parade est un exemple intéressant car les organisateurs essaient d’impliquer la population dans toute sa diversité, pour que chacun puisse se réapproprier l’espace public. Même chose à Charleroi, le Carnaval se veut inclusif ! Or, ce n’est pas évident car toutes les cultures n’ont pas le même rapport à l’espace public, au carnavalesque, au folklore… ».

Aller plus loin

Envie d’en savoir plus sur le sujet, de poser des questions, de donner votre avis ? Ne ratez pas la conférence de Karel Vanhaesebrouck. Ce mercredi 24 janvier, à partir de 19 heures, à la brasserie de l’Eden. En plus, c’est gratuit !